Une soixantaine de personnes sont venues écouter le partenaire tchadien du CCFD-Terre Solidaire, jeudi soir à la salle Jean Monnet à Guipavas.
Ce tchadien, Fortunat Alatarat, est responsable bénévole de l’association GRAVE (Groupe de Recherche et d’Animation du Vivre Ensemble) créée en 2016 sous l’impulsion du CCFD pour avancer sur le chemin de la réconciliation entre les musualmans arabophones du Nord et les chrétiens francophones du Sud. En proie à la violence et à des conflits incessants depuis la fin de la colonisation en 1960, dirigé par des hommes corrompus et motivés par le seul enrichissement de leur clan, ce pays est parmi les plus pauvres au monde et a besoin de retrouver la paix et la concorde pour avancer sur la voie du développement.
Fortunat a su captiver son auditoire qui a pris conscience des difficiles conditions de vie dans ce pays. Par exemple, Fortunat, enseignant en école publique, a des classes de terminale de plus de 120 élèves ! Et seulement un enseignant sur deux assure ses cours, les autres touchant le salaire sans remplir la fonction…
Fortunat a exposé les actions du GRAVE, avec ses succès et ses impasses.
Un travail fructueux est mené avec les écoles coraniques. Dans ces écoles, les maîtres, autoproclamés et sans formation, envoyaient leurs élèves mendier, afin de payer leur « scolarité », et pratiquaient des châtiments corporels. Ces enfants maltraités étaient ensuite des proies faciles pour les mouvements djihadistes qui les recrutaient comme combattants. Fort de ce constat reconnu par tous, le GRAVE a obtenu que, dorénavant, les maîtres reçoivent une formation avant d’enseigner et suivent un programme pour assurer à leurs élèves un apprentissage élémentaire, lire et écrire l’arabe, compter, etc… en plus de la découverte du Coran. Et ce ne sont plus les enfants qui doivent payer leur scolarité mais leurs parents !
Pour lutter contre les préjugés, fauteurs de haine, le GRAVE agit auprès des chefs religieux, des jeunes et des femmes en créant des groupes d’échanges. Apprendre à se connaître et se découvrir proches par delà les différences de religion, permet de monter ensuite des projets au service du bien commun. Ainsi, les femmes ont pris en main la gestion des greniers communautaires pour tenir pendant la période de soudure entre deux récoltes, ce qu’elles font très bien, contrairement aux hommes qui vivaient au jour le jour !
Dans deux domaines, le GRAVE n’obtient pas d’avancée jusqu’à présent :
La reconnaissance des enfants nés hors mariage : les jeunes musulmans qui engrossent des jeunes chrétiennes, nient ensuite toute responsabilité, au grand dam des familles de ces jeunes filles. D’ailleurs, les musulmans tchadiens mettent parfois la loi musulmane, la charia, au-dessus de la loi civile du pays.
Les conflits entre éleveurs et agriculteurs n’obtiennent pas de solution. Les éleveurs, souvent de riches propriétaires du Nord, embauchent des bergers et les arment, si bien que ceux-ci ne respectent aucun couloir de transhumance et laissent les bêtes pâturer sur les terres agricoles.
Fortunat a mentionné l’implication des évêques tchadiens qui n’hésitent pas à rappeler les uns et les autres à leurs responsabilités. Il a aussi laissé entendre son espoir de voir la société civile gagner en esprit critique et exiger de ses dirigeants de se mettre réellement au service du pays.